lundi 9 mars 2015

Nostalgie

En revenant d'une balade, j'ai glissé un CD au hasard dans la voiture. Un CD sans rien marqué dessus, comme souvent. Se sont élevées les premières notes. Les notes d'un concert du groupe de musique dans lequel j'ai joué pendant 8 ans. C'était faux. C'était arythmique. Ça piquait les oreilles. Mais ça a fait remonter des tonnes de souvenirs. 

Ma voix à commencé à fredonner les airs. Les parties de clarinette, de trompette, de trombone, de saxophone... Je me suis même rappelé les notes, les partitions, les parties difficiles. 

Et j'ai eu une grande vague de nostalgie. 

Ma jeunesse, c'est là bas que je l'ai passée. Quand certains allaient à des soirées, moi j'allais à des concerts. Quand le 11 novembre ou le 8 mai, vous faisiez la grasse matinée, j'étais dehors, les pieds dans la boue à m'arracher les lèvres sur mon bec par devoir de mémoire. Quand le mois de mai signifiait pour beaucoup les week end à la mer, pour moi c'était les corsos fleuris et les défilés. A la joie de la fin d'année à l'école se mêlait la tristesse de la fin de saison musicale. J'aimais ce groupe. J'aimais jouer. C'était comme une famille. J'y ai progressé plus qu'en 10 ans de cours. J'y ai connu mes premières amours et enfin le grand, le définitif, celui qui est encore là aujourd'hui. J'avais l'impression d'être jugée comme une adulte, d'être appréciée à ma juste valeur. 

Le cerveau aime à garder les bons souvenirs. 

Le miens aimerait ne se souvenir que de ça. Des concours, des voyages en bus, des pots de fin de répète et des fous rires. 

Il aimerait oublier les décès, les querelles, les mots injurieux, les jugements hâtifs, la réputation de cagolle que j'ai découvert, moi qui ne sortait jamais et qui n'ai connu que 4 hommes dans ma vie. 

J'aimerais oublier le changement, la lassitude, les coups bas. J'aimerais oublier que je suis passée 3ème clarinette en ayant été 7 ans 1ère, toujours fidèle au poste même quand personne n'était là, même pour les sorties ingrates qu'il fallait faire pour gagner des cachets, même quand je me suis retrouvée toute seule pour un concours national. J'aurais voulu oublier ce moment où ils sont tombés de leur piédestal, ce jour où j'ai découvert les vrais visages, où j'ai découvert que, finalement, ils étaient tous humains. J'aimerais oublier les crasses, les trahisons, la mauvaise humeur qui s'est glissée partout,  les disputes qui éclataient entre tous les pupitres, la morosité et finalement cette décision il y a 5 ans déjà de tout abandonner, de tout plaquer, parce que l'âme n'était plus là, parce que je n'y prenais plus aucun plaisir. 

Aujourd'hui j'aimerais revenir 10 ans en arrière. Revivre les bons moments. Revivre les super sorties et sentir à nouveau mon instrument vibrer. Sentir l'odeur de bois et de graisse à liège, le goût des anches Vandoren 3 ou 3,5 en fonction de la fatigue. Ressentir le plaisir de jouer mes morceaux préférés. Avaler les mêmes kilomètres au soleil ou sous la pluie quand on couvrait nos instruments pour ne pas qu'ils souffrent de l'humidité. Les mi-bas glissés sur les saxophones pour éviter les confettis qui s'engouffrent partout pendant les carnavals. Les private joke pendant les concerts. Les clins d'oeil complices. La chemise blanche et le pantalon noir. Retrouver ma place, 2ème rangée, troisième sur la droite, derrière les percussions. Entendre le chef d'orchestre qui disait "bon aller, on prend le 1 (er morceau) et on tourne !". 

Je n'ai même pas l'envie d'y retourner parce que je sais qu'aujourd'hui, je n'y aurais plus ma place. Les visages ont du changer, les morceaux et l'ambiance aussi. Je n'aurais plus mes repères. 

Alors je ne garde que les souvenirs. 

Et des CD enregistrés à la sauvage où on entend le public parler et les bâches qui entouraient la scène faire un bruit de fusée à chaque coup de vent. 





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les commentaires sont modérés alors ne t'inquiète pas s'ils mettent du temps à s'afficher, je suis pas toujours là mais ça finira par arriver et j'y réponds (presque) toujours !